Numéro 193

Janvier 2019

Tome XLIX

AUX SOURCES DU PREMIER ÉCOSSISME

SOMMAIRE

  • Pierre Mollier - Avant-propos, p. 1
  • Paul Paoloni - Notes sur l'essor de la Maçonnerie spéculative dans les îles britanniques et sur le continent. Les nouveaux grades de Maître, Maître écossais et Passé maître. Constitution des rituels (1723-1744), p. 2

EDITO

Avec ce numéro 193, Renaissance Traditionnelle aborde – dans des délais raisonnables – l’année 2019. Mais qu’importe le calendrier profane quand nous nous plongeons dans des sujets aussi passionnants et essentiels ! Nous prolongeons en effet ici l’enquête sur les débuts de l’Écossisme de notre dernière livraison. La problématique se résume à quelques questions : le premier haut grade : où ? quand ? comment ? Paul Paoloni nous propose ici une recherche approfondie et très documentée pour tenter d’éclairer ces trois points.

D’abord il s’agit moins d’un « haut grade » que d’un quatrième grade. Son apparition doit donc être mise en rapport avec la fixation du système « canonique » en trois grades par la première Grande Loge entre 1720 et 1730. Il apparaît bien établi aujourd’hui que la source de ce quatrième grade, appelé à engendrer une nombreuse descendance, se trouve dans les mystérieux « Scot Masters » attestés en Angleterre au milieu des années 1730. Comme la Maçonnerie symbolique, les premiers hauts grades – loin d’être une création tardive et française comme cela a longtemps été affirmé – sont d’origine britannique et s’inscrivent dans le sillage de la formation de la Maçonnerie spéculative elle-même. Bien sûr l’enquête nous conduit vite en France, en Allemagne et même au Portugal… mais dans des milieux maçonniques qui restent très liés à Londres. Alain Bernheim avait souligné en son temps combien les Maçonneries française et anglaise étaient restées proches jusqu’en 1750. Cela souligne combien la Maçonnerie doit être considérée d’emblée comme un phénomène européen dans cette première moitié du xviiie siècle.

Paul Paoloni a rassemblé ici les principaux éléments du dossier, les remet dans leur contexte… et s'efforce de les relier les uns aux autres pour proposer une hypothèse quant à la nature de ce « quatrième grade » originel. Un point nous paraît devoir être mis en lumière dans cet impressionnant travail. On associe en général, et nous l’avons nous-même fait à plusieurs reprises, le premier « quatrième grade » à un Royal Arch archaïque. On retrouve d’ailleurs le thème symbolique du Royal Arch dans plusieurs hauts grades continentaux très précoces comme l’« Écossais de la Voute » sous ses différentes formes. Or cela rend difficile l’intégration à ce schéma du Maître Parfait – ou des « Maîtres Écossais » allemands –, qui n’ont pas de Voute… alors qu’il s’agit probablement d’« autres grades » parmi les plus anciens. Pour Paul Paoloni, les choses se sont faites en deux temps. Dans un premier temps, le « Scot Master » britannique – et ses équivalents « Maître Écossais » continentaux – se caractérisent par une légende qui les situe dans les ruines du Temple de Salomon où le récipiendaire redécouvre – par terre, sous une pierre, au pied d’une colonne, sans plus de précision – le secret perdu du vrai nom de Dieu. Dans un deuxième temps – et c’est un enrichissement « théâtral » presque naturel – cette découverte est transférée dans une voute oubliée dans les fondations du Temple. On passe du Maître Écossais à son développement en Royal Arch. La Maçonnerie continentale, et notamment française, gardera dans sa pratique les vestiges de ces deux couches géologiques…

Nul doute, cher lecteur, que ce beau numéro ne vous conforte dans l’idée de vous réabonner pour cette nouvelle année 2019. Votre soutien est la seule richesse de notre revue et le garant de sa pérennité et de son indépendance.

Pierre Mollier

EXTRAITS

Les début de la franc-maçonnerie en France décrits par Jérôme Lalande dans l'article "Francs-maçons" de l'Encyclopédie, 1777.
Les trois composantes du mot, typique du Royal Arch dans un manuscrit français de « Grand ou Royal Arche », vers 1775.